RE: A l'ombre d'une bougie
Mentor ou Dante, ou qui que se soit... peut importait au jeune Seïgura.
Personne n'ayant jamais daigné lui raconter quoi que se soit d'utile à propos des tourments d'une famille éclatée, il n'avait réussi, à force d'effort et d'heures d'épluchages d'ouvrages rébarbatifs, qu'à réunir des lambeaux d'informations, il se pouvaient donc fort bien qu'elles soient erronées.
Il enregistrait donc soigneusement chaque nouveauté qui sortait de la bouche du drow.
Il connaissait déjà les tortures dont avait été victime son père pour avoir du les soigner au retour de celui-ci. Des mois passés à garder le semi mort alité, penser ses plaies, calmer ses angoisses, maîtriser ses crises... Et tenter de réparer la pire insulte ayant pu être faite à un vampire : ses quatre canines lui avaient été arrachées... Cette partie de l'histoire lui importait donc peu.
Cependant, considérant les actes barbares découverts sur son géniteur, il doutait plus qu'un peu que les ceux effectués sur Sashina est pu être si doux... Au fur et à mesure que son oncle faisait glisser des propos acides et douloureux qui devaient moisir dans son gosier depuis quelques temps déjà, Rochel laissait son esprit construire les images, fabriquer les scènes. Il voyait sa chère mère trop peu connue liée, battue, humiliée, se vidant petit à petit de son sang, la beauté de son corps mise à l'épreuve des fers brûlant, des pinces, couteaux à viande... Se concentrant le plus possible, il évoqua la vision de ses chaires déchiquetées ayant eu la force d'enfoncer une lame au plus profond de ce qui restait de son être pour abréger ses souffrances...
Les anciennes haines qu'il était parvenue à étouffer au fil des années ressurgir : la frustration de n'avoir jamais pu lui parler réellement, lui montrer qui il était et ce qu'elle était pour lui, celle de n'avoir pu accompagner son père la chercher (celui-ci s'étant enfui un matin sans rien lui dire, le séquestrant sans nouvelles au manoir), celle de n'avoir jamais pu la venger par la suite...
Avait-elle pensé à lui pendant son calvaire ? Lui, du bas de son enfance, n'avait cessé de prier Hécate pour qu'elle lui revienne, puis avait finit par se résigner, transformant son despotisme religieux en rage destructrice qu'il réservait pour l'instant où il serait suffisamment fort pour la faire éclater librement.
Et aujourd'hui ce pathétique individu était venu le trouver, en larmes, pour lui conter comment il l'avait détruite...
Rochel ne savait trop comment gérer la stupidité d'un être si ridicule. Les lèvres plissés, ses yeux verts mordorés débordant de haine, tout son corps tendu en un seul élan de dégoût et de rage, il se jeta sur lui et lui plaqua une lame contre les abdominaux.
Ses efforts visibles pour se contrôler provoquaient en lui des violents tremblements. La sueur perlait sur son front, ses canines luisaient dans la nuit, il en pleurait presque, mais venait de décider qu'il ne réduirait pas à néant cet être misérable...
Lui crachant au visage, il murmura d'une voie achée trahissant le prix que lui coûtaient ses propres mots :
- Tu ne mérites pas même que je te tue... Se serait un sort trop doux, trop facile... Que dois-je faire alors ? Te torturer a mort comme tu le fis pour elle ? Fais-moi confiance j'en connais déjà un rayon, je pourrais faire durer ton agonie des mois et des mois, à t'en faire perdre la raison, et m'en régaler jusqu'à l'orgasme... Qu'en dis-tu mon oncle ? Peut-être alors mes démons s'apaiseraient pour quelque temps...
Parfois hurlant, parfois murmurant, on ne pouvait dire s'il se parlait à lui-même, à son oncle, ou à quelquun d'autre encore. Très doucement, sa lame s'était enfoncée dans le ventre de l'homme saoul, juste quelques millimètres... Le jeune homme paraissait à bout de force, l'effort qu'il effectuait pour résister à la tentation d'achever cette pourriture dans l'instant lui coûtait plus qu'il ne l'aurait cru... Au prix de toute sa volonté, il retira la dague, la rangea contre sa cuisse, et appuya fortement sur la plaie avec ses doigts.
- Réponds créature abjecte... A quoi t'attendais-tu à venir ici me tenir ce discours ? Que veux-tu ? Vider ton sac de noirceur devant moi pour gagner l'apaisement de ta conscience ?
Il enfonça le bout de ses ongles dans la plaie ouverte avec un ravissement non dissimulé, imaginant d'avance les jeux exquis auxquels il pourrait se livrer sans remords sur un membre de sa famille pendant les semaines à venir...